Type de texte | source |
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Titre | L’Entretien des bons esprits sur les vanitez du monde |
Auteurs | Puget de la Serre |
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Date de publication originale | 1630 |
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, « De la vanité des portraicts et des statuës » (numéro ch. VIII) , p. 243-245
Les historiens remarquent que ce Prince n’avoit rien d’invincible que le courage, estant esclave d’un grand nombre de passions, qui ternissoient l’esclat de sa gloire. Et parmy celles qui le possedoient absolument, la vanité en tenoit l’empire. Car en combien de sorte (sic) se faisoit-il peindre par Apelles. Tantost monté sur son Bucephale, en action de faire trembler toute la terre par l’effroy d’un seul de ses regards. On l’admiroit autresfois sous l’habit d’un Iupiter Amon ; mais ce qui est considerable, ses regards ne faisoient trembler la terre qu’en peinture, et il n’estoit adorable que dans son portrait. Sa vanité alloit bien encore plus avant. Si l’on veut se representer l’excez de son ambition, plus digne de pitié, et de risee, que d’envie. […] Mon humeur curieuse me presse tousiours, l’envie me prend, de sçavoir encore où sont toutes ces statuës de l’Isipe, et ces tableaux d’Apelles, qui representoient diversement Alexandre. L’un, deffiant avec la perfection de son art, la merveilleuse industrie de l’autre.
Dans :Apelle et Alexandre(Lien)
, « De la vanité de la Renommée » (numéro ch. VII) , p. 207-208
En toutes les Sciences, en tous les Arts, et en toutes les actions publiques, les hommes se sont tousiours peinez d’en acquerir la perfection, l’un à l’envy de l’autre. Aristote en sa profession, a disputé la pomme avec tous ses compagnons, et pas un ne l’a emportee, parce qu’elle sert de prix à une gloire qui ne se peut iamais acquerir. Apelles a paru en lice aussi bien que Zeusis pour la peinture, et tous deux veritablement ont fait des merveilles à representer leurs defauts ; Iugez de quelle nature peut estre leur renommee. Lisipe et Phidias ont relevé aussi en bosse leurs imperfections, et en ont laissé le relief, afin que la memoire endure tousiours. Ce n’est pas que leurs ouvrages ne soient admirables : mais non pas iusques au point de meriter la gloire de cette renommee qu’ils cherchoient. Ie n’aurois iamais fait, si ie voulois mettre en avant le nom de tous ceux qui les premiers ont animé les inventions que nous avons de toute sorte d’arts. Mais quoy que leurs apprentifs mettent tous les iours en œuvre, la renommee de ces grands maistres, c’est tousiours un feu estaint, dont les cendres seulement demeurent, ne pouvant prendre une forme plus vile, et plus abiecte.
Dans :Zeuxis et Parrhasios : les raisins et le rideau(Lien)
, « De la vanité de la beauté » (numéro ch. XIII) , p. 488-489
Puis que ie suis d’humeur de dire la verité, ie ne veux rien celer, il n’y a jamais eu de beauté sans deffaut, fors que celle de la Vierge, mais c’estoit aussi un chef-d’œuvre, où Dieu avoit mis la main, puisque ce devoit estre le premier berceau, où il devoit reposer. Parlons seullement des ouvrages de la Nature, elle n’en a jamais fait, qu’il n’y ait quelque chose à dire. D’où vient que ce grand Peintre, dans le dessein qu’il eut de representer, selon sa fantaisie, la belle Heleine, fit un triage des plus belles filles de la ville, et de chacune son pinceau en desroba quelque chose. Tellement que d’un grand nombre de beaux visages, il n’en fit qu’un. Ce qui nous presche l’impuissance de la Nature, à former une Beauté sans deffaut.
Dans :Zeuxis, Hélène et les cinq vierges de Crotone(Lien)